Il y a très exactement 20 ans aujourd’hui, Michel Aumont créait le spectacle Souffles en boucles et j’officiais à la mise en son. C’était au Carré Magique, à Lannion, dirigé à l’époque par Roger Le Roux, Solange Grégam et Dominique Maréchal.
Souffles en Boucles était le premier solo pour clarinette et looper de Michel et je lui avais proposé de spatialiser les boucles sur un dispositif de 8 haut-parleurs. Michel avait composé les bases de la musique sur l’Oberheim echoplex et les boucles s’entassaient donc dans une mémoire unique dont l’une des conséquences était que les premières boucles avaient tendance à s’écraser au fur et à mesure que Michel empilait les overdub. La seconde conséquence était que la sortie du looper était forcément monophonique et je ne recevais donc qu’un signal unique à la console.
Après quelques recherches infructueuses, nous étions alors en 2002, force était de constater qu’il n’existait pas encore de looper capable d’empiler jusqu’à 10 boucles en multicanal. Je proposais donc à Michel de concevoir un looper qui répondrait à ce cahier des charges en conservant l’ensemble des fonctionnalités qu’il avait l’habitude d’utiliser avec l’échoplex. Michel n’était pas certain que la chose soit possible, car nous savions au moment où nous en parlions qu’il fallait que l’outil soit prêt avant un an pour préparer la première du spectacle qui aurait lieu le 24 février 2004. De mon bord, je pensais naïvement qu’il serait simple de fabriquer un tel outil…
J’ai donc commencé par faire un prototype qui enregistrait une boucle de base et quelques overdub puis nous avons fait un premier essai avec Michel. Haha… Michel commence à empiler comme il l’aurait fait avec l’echopex et en moins d’une minute tout était planté ! Je n’avais pas réalisé à quel point les enchainements des commandes étaient centraux dans un looper. En effet, enregistrer les boucles et les restituer est presque un détail dans l’affaire et la difficulté réside dans l’interface avec l’interprète. Michel avait développé une telle technique et jouait les boucles avec une telle virtuosité que la machine devait suivre et s’en sortir, quels que soient les enchaînements de cas de figure.
À partir du prototype, nous avons travaillé sans relâche pendant plus d’un an, je développais les fonctions les unes après les autres à partir d’un cahier des charges fixé par Michel, dans la nuit je lui faisais parvenir les nouvelles fonctions et les corrections de bugs et lui, dès le matin, testait tout et me faisait un rapport. C’est en travaillant ainsi que nous avons créé ce que l’on appelle le Looper Principal de Logelloop, qui est en réalité une sorte d’émulation de l’Echoplex moins quelques fonctions dont Michel n’avait pas l’utilité, mais avec en plus quelques autres fonctions qui lui étaient personnelles.
Dès lors que le Looper était suffisamment fonctionnel, je me suis attelé au développement du spatialiseur. Ce dernier recevait par le réseau des informations provenant de Logelloop telles que les durées de boucles, le nombre de pistes, les changements de banques de son, etc. Cela permettait de caler les déplacements de son sur le tempo de la musique.
Le 24 février 2004, Michel Aumont utilisait Logelloop pour la première fois devant une salle comble au Carré Magique à Lannion. Malheureusement Michel s’en est allé en 2020 sans quoi, je l’aurai appelé ce matin pour lui souhaiter un Logelloopanniversaire en boucle… Et s’il avait encore été des nôtres, c’est également lui qui aurait ouvert la fête qui aura lieu au Logelloù les 3, 4 et 5 mai prochains. Le 3 mai, la soirée sera en sa mémoire et nous commencerons à 19 heures par un hommage en présence de quelques-uns des musiciens qui l’ont accompagné lors de ses différentes créations.
Laisser un commentaire